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Il s’agit de désenclaver le centre en réalisant une grande croisée Nord-Sud et Est-Ouest. Napoléon III aurait “conçu une carte de Paris sur laquelle on voyait tracées par lui-même en bleu, en rouge, en jaune et en vert suivant leur degré d’urgence les différentes voies nouvelles qu’il se proposait de faire exécuter”. La grande trouée nord-sud, de la Villette à la barrière d’Enfer (place Denfert-Rochereau), est réalisée par la percée du boulevard de Sébastopol, alors appelé boulevard de Strasbourg, inauguré en 1858 et prolongé sur la rive gauche par le boulevard Saint-Michel. La grande percée Est-Ouest est quant à elle bien incomplète puisqu’elle ne concerne que la rive gauche avec le boulevard Saint-Germain. «Le second réseau trouera la ville de toutes parts pour rattacher les faubourgs au premier réseau» (La Curée, p. 113). De nouveaux boulevards (boulevard du Port-Royal, boulevard du Prince-Eugène – actuel boulevard Voltaire –, boulevard Saint-Marcel) permettent une circulation concentrique avec l’objectif premier de relier les gares parisiennes entre elles. Le résultat est en fait bien médiocre ; seules les gares du Nord et de l’Est sont aisément accessibles de l’une à l’autre. La gare Montparnasse est quant à elle très mal raccordée au centre du fait d’une mauvaise conception de la rue de Rennes : si son tracé avait été poursuivi tout droit vers la gare du Nord, il aurait entraîné la destruction de l’Institut et d’une partie de la colonnade du Louvre. “Il y aura un troisième réseau […] celui-là est trop lointain, je le vois moins, [...] mais ce sera de la folie pure, le galop infernal des millions, Paris soûlé et assommé” (La Curée, p. 114). Le troisième réseau enfin, le plus onéreux, vise à ouvrir Paris sur les 18 communes des faubourgs annexées en 1860. La capitale a alors doublé sa superficie en empiétant sur l’espace compris entre l’ancien mur des Fermiers généraux et les fortifications datant de 1841-1845.
De nouveaux boulevards sont créés (boulevard Arago, boulevard de Grenelle) sur l’enceinte du XVIIIe siècle, détruite, et la population parisienne passe de 1 million à 1 696 000 habitants. Il s’agit de donner de l’espace à la capitale par de larges “entailles”, tout en édifiant des monuments urbains dignes d’une capitale européenne. Gustave Le Gray vient de quitter la barrière de Clichy avec la vue «médiévale» de la butte Montmartre. Il est installé 35, boulevard des Capucines, dans un quartier au début de sa mutation, alors que les travaux de l’Opéra n’ont pas commencé. Le nouvel Opéra, conçu par Charles Garnier en 1861 est inauguré en 1875 seulement. Sa construction est décidée par décret impérial sur un emplacement choisi par Haussmann lui-même, ce qui contribuera à accentuer le glissement des activités vers l’Ouest parisien. Véritable monument urbain, dont le gabarit et l’apparence sont désormais unifiés, l’immeuble haussmannien comprend généralement cinq étages, entresol compris, surmontés d’un sixième étage mansardé, réservé au personnel de service. La modernité et le confort sont de règle : “eau et gaz à tous les étages”, comme le signalent les panneaux à l’entrée. Le règlement de 1859 établit désormais un rapport entre la hauteur de l’immeuble et la largeur de la rue, qui doivent être identiques. À l’intérieur, le principe d’uniformité domine et les appartements se ressemblent tous d’un étage à l’autre. La ségrégation verticale, qui opposait les étages “nobles” du premier et du deuxième aux étages roturiers du troisième et du quatrième, laisse la place à une ségrégation horizontale, entre la rue aux façades de pierre de taille et la cour en brique, ou entre quartiers bourgeois à l’Ouest, et quartiers populaires à l’Est, au Sud et au Nord. Pour paraphraser Emile Zola, vous ne pouvez pas dire que vous avez compris la transformation de Paris si vous n’avez pas vu les photographies de Gust