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272 George SAND. 1804-1876. Femme de lettres. L.A.S. « G » à l’abbé Rochet, desservant de la Champenoise. La Châtre, 1er février 1836. 8 pp. ½ in-4, adresse, marques postales, petites déchirures sur les derniers feuillets.
Très belle et longue lettre de Sand, au moment de son procès, sur ses démarches auprès de l’évêque, mentionnant son roman Lélia, fustigeant les préjugés d’une société conservatrice, etc. A propos de son procès en séparation avec Casimir, elle explique combien elle s’est engagé dans une affaire qui lui prendra du temps, et en explique les raisons : (…) Mon neveu le nouveau préfet, et moi, nous sommes longtemps perdus de vus ; lui et sa famille parce qu’ils haïssaient ma conduite démocratique ; moi, parce que je ne voulais pas me soumettre à leurs théories de patriciens (…). Je ne suis donc pas étonnée qu’il ne m’ait pas donné encore signe de vie, et après tout, dans la position où je suis, plaidant en séparation, n’ayant pas encore mon domicile légal chez moi, je ne puis l’engager à me venir voir (…) J’ai la vanité de croire que ses anciennes préventions sur mon caractère hautain et indépendant, seront bientôt détruites. Alors j’espère qu’il sera très obligeant et que je pourrai à coup sûr réclamer son zèle (…). Elle lui demande de la laisser faire seule ; Vous savez comme on interprète toutes choses en ce bas monde. Laissez-moi agir (…). Mon procès sera jugé devant l’opinion aussitôt qu’il sera devant les tribunaux (…). Si je perds mon château, vous verrez que je perdrai bien des sourires et bien des révérences. Si je le gagne au contraire, je serai blanche comme neige et je pourrai me réclamer de mes grands-parens. Ainsi est faite la société, il faut lui faire la guerre pour avoir la paix. Il faut la remuer et lui faire signer le traité qui assure notre dignité et notre repos (…). Elle lui prête Lélia, ouvrage qui est devenue rare, et espère lui offrir bientôt la nouvelle édition complète de ses Rêvasseries. (…) Vous
savez lire, vous verrez que ne n’ai rien conclu et que j’ai peints la souffrance humaine, l’espoir aux prises avec le doute (…). Chaque personnage représente une passion (…). Elle poursuit à propos de plusieurs ouvrages qu’elle voudrait lui prêter mais qu’on lui a empruntés, et ajoute ; Mais comme pour bien lire, il ne faut pas trop lire à la fois, vous en avez assez pour le présent. Sand demande qu’il lui renvoie son exemplaire de Jacques, dont elle voudrait corriger pour une seconde édition. Elle poursuit, dans de grand élan idéaliste : Parlons de vous, maintenant. Je voudrais que vous fussiez non pas moins fier et moins ardent vers les idées généreuses, mais moins chagrin et moins impatient avec les mauvais hommes (…). Les hommes sont bien méchants et bien vils, j’en conviens, mais ils sont si faibles (…). Elle l’engage à vivre heureux dans la voie du stoïcisme, et dans la contemplation de l’univers, la pensée du ciel, en savourant les délices de la solitude ; la prière, la méditation, l’étude et la poësie, il est impossible que l’on n’arrive pas à un tel état de l’âme, que les événemens extérieurs soient sans effet. On est convenu de dire qu’avant tout, il faut vivre, que les soucis de la vie matérielle, absorbent les forces de la vie intellectuelles, qu’il n’est pas de poésie sans loisir, par de courage sans orgueil satisfait, pas de santé sans les aises de la vie (…). Je puis vous le dire par expérience, on peut survivre moralement à tous les désastres (…) L’espérance du mieux n’abandonne jamais celui qui est décidé à travailler (…). Ce n’est pas une gloire humaine que nous cherchons, c’est le moyen de faire le bien (…). Joint une copie de la correspondance de Sand à l’abbé Rochet entre 1836 et 1850, formant 27 lettres inédites (env. 45 pp. ½ in-8 ; 1836 : sur son déshonneur après la décision du tribunal de s’opposer au jugement de séparation, sur sa