references
Leonor Fini
témoigne d’une entière lucidité au-delà de l’égarement aveugle, car c’est elle qui la prépare au rapt total, celui qui ne rencontrera, du côté du ravisseur, aucun obstacle. » Le commentateur insiste sur l’éminent mystère entourant l’attitude de la femme qui semble quasi volontaire face au rapt, assimilé selon lui au viol, dont elle va être la victime. Grâce à l’utilisation d’un vocabulaire visuel polysémique et à un certain flottement atmosphérique, Leonor Fini livre, dans L’Enlèvement, les clés d’un art aussi édifiant que sa créatrice.
Bien qu’elle soit née en 1907 en Argentine, Leonor Fini a été élevée à Trieste dans le Nord de l’Italie. Dès l’enfance, elle est imprégnée de culture classique italienne que lui inculquent une famille et un entourage bourgeois et qui influencera durablement son art. C’est à ses dix-sept ans qu’elle débute réellement sa carrière de peintre, en autodidacte. Inévitablement, l’appel du centre artistique névralgique qu’est Paris retentit : Leonor Fini gagne la Ville Lumière en 1937, après une immersion de treize ans au sein de la scène milanaise. A Paris, elle est rapidement introduite auprès du groupe surréaliste dont elle ne fera jamais partie intégrante, refusant toute étiquette. Pourtant, les théories et idéaux tels qu’ils sont formulés ou adoptés par Breton, Eluard, Ernst ou encore Man Ray opèrent une influence décisive sur son art, tant dans les sujets que dans sa conception du geste créatif – elle pratiquera comme eux dessin et écriture automatiques. L’œuvre de Leonor Fini ne peut être bornée, limitée à sa seule production peinte ; muse de photographes, artistes, écrivains et cinéastes, la mise en scène de sa propre personnalité ainsi que de son corps en constitue également une facette. Parallèlement, l’image de la femme est au cœur de sa peinture, revêtant une implacable et éternelle ambivalence, Leonor Fini la fait tour à tour prédatrice ou victime, dominatrice ou impassible objet de contemplation, toujours belle et voluptueuse, fatale et charnelle. L’Enlèvement propose une scène énigmatique, typique de l’ambiguïté et de la tension caractéristiques de l’œuvre de Fini. Pierre Borgue, au sein de l’ouvrage qu’il consacre à l’artiste en 1983, affirme : « La passivité de l’adolescente du bas de L’Enlèvement
Although born in Argentina in 1907, Leonor Fini was raised n Trieste in northern Italy. Already in her childhood, she was imbued with classical Italian culture by her family and bourgeois entourage, which would permanently influence her art. It was at the age of seventeen that she really started her career as a self-taught painter. Inevitably, the call of the artistic hub of Paris drove Leonor Fini to the City of Light in 1937, after having spent 13 years in the Milan scene. In Paris, she was quickly introduced to the Surrealists, of which, refusing any label, she was never a true part. Yet, the theories and ideals as formulated or adopted by Breton, Eluard, Ernst, and Man Ray had a decisive influence on her art, both in terms of subject matter and in the way in which she conceived the creative act, and also included drawing and automatic writing in her practice. The work of Leonor Fini can not be strictly limited to her pictorial creations; a muse of photographers, artists, writers, and filmmakers, staging of her own personality and body was also a facet. At the same time, depicting women was at the heart of her work. Assuming an implacable and eternal ambivalence, Leonor Fini made them alternately appear as predators or victims, as domineering or passive objects of contemplation - but always beautiful and voluptuous, fatal and carnal. The Rapture shows an enigmatic scene, so characteristic of the ambiguity and tension generally found in Fini’s work. Pierre Borgue, in his 1983 book about the artist, asserts: «The passivity of the adolescent at the bottom of The Rapture suggests complete lucidity, beyond blind aberration, as this is