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Louis Valtat
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Oeuvre en rapport : Louis Valtat, Autoportrait, 1892
Louis Valtat naît à Dieppe en 1897. Son père, peintre amateur, l’initie aux arts graphiques très tôt. A la suite du déménagement de sa famille à Versailles en 1880, Valtat intègre l’Ecole des BeauxArts de Paris en 1886 où il étudie dans l’atelier de Jules Lefebvre. Parallèlement, il fréquente la très libre Académie Julian où il suit l’enseignement de Gustave Boulanger, puis celui de BenjaminConstant. Il y rencontre les futurs membres du groupe nabi tels qu’Edouard Vuillard, Pierre Bonnard, Maurice Denis ou encore Paul Sérusier. Atteint de tuberculose, Valtat réalise plusieurs séjours en hospice dans le Sud de la France dans les années 1890 afin de traiter sa maladie. De là, il opère divers voyages en Espagne. Ces excursions hispaniques peuvent être à l’origine du sujet de la toile que nous proposons mettant en scène Trois jeunes gitanes. En outre, la lumière du Sud influence la manière de peindre de l’artiste et rénove sa conception de la couleur et de son rendu sur la toile. Trois jeunes gitanes témoigne de certains préceptes que Louis Valtat partage avec les Nabis et certains protagonistes de la scène parisienne, qui se nourrissent réciproquement. L’audace du cadrage manifeste quant à lui l’influence de peintres comme Degas ou Toulouse-Lautrec qui sont alors à la pointe de l’avantgarde de la fin du XIXe siècle. Les trois jeunes gitanes, sujets de la toile, sont paradoxalement repoussées à l’arrière de la composition par l’apparition intempestive, au premier plan, d’un spectateur dont ne nous est offert à la vue que le dos, imposant et noir. Cette incursion ponctuelle permet à Louis Valtat l’élaboration d’une vaste plage sombre, quasi-uniforme, faisant pendant à la zone rouge du rideau occupant la partie haute de l’œuvre. Les costumes des protagonistes féminines, bariolés, autorisent quant à eux une explosion de couleurs et de touches disloquées, donnant un aspect éminemment vibrant et sonore à la peinture, recréant visuellement l’atmosphère bavarde et tumultueuse de la performance musical se perpétrant.
C’est précisément cette libération de la couleur – devenue un élément structurant de la toile grâce aux larges aplats qui participent à l’organisation de la composition – qui sera la cause de l’association de l’œuvre de Valtat avec le courant fauve, et ce dès le scandale du Salon d’automne de 1905, alors même que ses liens avec les membres fondateurs du mouvement ne sont que superficiels. Le simple fait du rapprochement effectué de manière instinctive par la critique contemporaine constitue en lui-même une preuve de l’étonnante et brillante modernité de la peinture de Louis Valtat, ainsi que de son inventivité précoce dont les Trois jeunes gitanes sont une éloquente incarnation.
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Œuvre en rapport : Louis Valtat, Femmes, 1897
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